Capitalisation/
Émettre des parts d'une coopérative : beaucoup plus qu'une simple formalité
Pour accroître son niveau de capitalisation, une coopérative a la capacité d’émettre des parts sociales, des parts privilégiées et des parts privilégiées participantes. Il s’agit d’un moyen distinctif lui permettant d’atteindre une plus grande stabilité financière en vue d’assurer son développement et sa pérennité.
Émettre des parts est une action importante, qui ne doit en aucun cas être faite à la légère. Puisqu’il s’agit de valeurs mobilières, de nombreuses formalités sont requises. De plus, toute coopérative a le devoir de gérer avec prévoyance les sommes qu’elle recueille auprès de ses membres pour soutenir ses activités. Cet apport au capital témoigne de l’implication des membres et de leur confiance à l’endroit de leur coopérative. Il importe d’entretenir soigneusement ce lien de confiance, puisqu’il est l’essence même d’une vie associative garante du succès de toute entreprise coopérative.
La base...
Le règlement de la coopérative
La coopérative doit d’abord et avant tout introduire dans son règlement une disposition autorisant le conseil d’administration à émettre des parts. Le conseil devient ainsi habilité à déterminer les montants, privilèges, droits et restrictions des parts ainsi que les conditions de leur rachat, remboursement ou transfert. Toutefois, dans le cas des parts privilégiées participantes, ces caractéristiques sont déterminées par règlement.
La résolution déterminant les caractéristiques des parts privilégiées
Pour créer une catégorie de parts privilégiées, le conseil d’administration doit adopter une résolution qui en détermine les caractéristiques. Ces caractéristiques peuvent varier en fonction des besoins de la coopérative et des attentes de ceux qui feront l’acquisition de parts. Ce mode de capitalisation a une réelle souplesse, car il peut y avoir autant de catégories de parts que nécessaire. Cependant, il faut se rappeler ce qui suit :
- La création d’une catégorie de parts doit toujours s’inscrire dans une vision globale des besoins de capitalisation de la coopérative. Quels besoins veut-on combler en créant une nouvelle catégorie de parts? Les catégories existantes pourraient-elles y répondre? Est-il véritablement nécessaire d’ajouter une autre catégorie de parts, au risque de complexifier la structure de capital de la coopérative?
- Toute nouvelle catégorie de parts doit s’intégrer de façon cohérente à la structure de capital existante . À quoi bon créer une nouvelle catégorie de parts dont les caractéristiques sont identiques à une catégorie existante? La nouvelle catégorie aura-t-elle pour effet de modifier les droits et privilèges des titulaires des parts déjà en circulation?
- Les parts sont de la même nature qu’un contrat. Leurs caractéristiques, qui lient la coopérative et les titulaires, ne peuvent en aucun cas être modifiées unilatéralement.
- Chaque catégorie de parts doit assurer un traitement équitable des titulaires de parts entre eux.
De façon générale, les privilèges, droits et restrictions prévus par les caractéristiques des parts privilégiées concernent plusieurs aspects, comme le droit d’acquisition, le droit pour le titulaire de recevoir des intérêts, la durée de détention ainsi que les modalités et les priorités de rachat ou de remboursement .
La résolution d’émission des parts privilégiées
Lorsqu’une catégorie de parts est créée, le conseil d’administration peut émettre des parts de cette catégorie. Il le fait au moyen d’une résolution, qu’il adopte au moment où il le juge opportun. Plusieurs coopératives semblent omettre cette étape importante, qui confirme l’émission des parts.
Les parts peuvent être émises une fois au cours d’une année donnée (par exemple au moment où des ristournes en parts sont déclarées) ou à quelques reprises dans l’année, en concordance avec les pratiques de gestion établies. Il importe de consigner très précisément la date d’émission des parts et les montants, lesquels doivent être portés en conséquence au registre, au nom du titulaire. Rappelez-vous que dès le moment où les parts sont émises par le conseil et consignées au registre leurs modalités sont applicables et doivent être respectées.
Le certificat
Il n’est pas obligatoire de délivrer un certificat lorsqu’une coopérative émet des parts privilégiées. Si elle choisit de le faire, le certificat doit, en plus d’indiquer le montant, énoncer l’ensemble des caractéristiques des parts ou être accompagné d’une copie de la résolution qui les détermine.
Même si une coopérative ne délivre pas de certificats, elle a la responsabilité de bien informer les titulaires des parts. Minimalement, ils doivent avoir reçu une copie de la résolution déterminant les caractéristiques des parts et connaître précisément les montants qu’ils ont investis ainsi que la date où les parts ont été émises à leur nom . De plus, ils doivent être en mesure de connaître leur niveau de risque.
Par ailleurs, si une coopérative émet des parts privilégiées participantes, un certificat doit impérativement être délivré. Le montant et les caractéristiques des parts y sont alors inscrits, ou une copie du règlement déterminant leurs caractéristiques y est annexée.
Le registre
Le registre témoigne de l’identité de la coopérative et il est, en quelque sorte, sa mémoire... Inutile de préciser qu’il doit être tenu avec une rigueur sans faille!
La Loi sur les coopératives (RLRQ, chapitre C-67.2) impose plusieurs exigences quant au contenu du registre . Plus particulièrement, il doit comprendre une section complète d’information sur les membres et le capital social. Cette section doit contenir :
- une liste des membres, des membres auxiliaires et des autres titulaires de parts, comprenant leur nom, leur adresse ainsi que le nombre de parts sociales, de parts privilégiées et de parts privilégiées participantes détenues par ces personnes;
- les dates de souscription, de rachat, de remboursement ou de transfert de chaque part, ainsi que le montant dû sur ces parts, le cas échéant.
Tous les membres peuvent consulter cette section du registre.
La base de la base...
Satisfaire à toutes les formalités requises en matière d’émission de parts n’est pas une mince tâche … De saines pratiques de gestion et un suivi rigoureux sont essentiels pour assurer la bonne marche de cette importante et délicate fonction qu’est la gestion du capital.
Une coopérative dont les administrateurs et gestionnaires se rallieront aux mots d’ordre ci-dessous sera forcément gagnante.
Compréhension des gestes accomplis
Le capital social est une composante trop importante pour que sa « destinée » soit laissée au hasard. Prenez le temps nécessaire pour bien comprendre le sens et l’effet de toutes les décisions que vous devrez prendre.
Rigueur à tous les niveaux
La rigueur est la pierre d’assise d’une saine gestion du capital. Chaque décision prise et chaque geste accompli doivent être consignés avec précision afin que la coopérative puisse, en tout temps, rendre compte à qui de droit.
Information aux titulaires
N’oubliez surtout pas qu’informer adéquatement les titulaires de parts ne constitue pas un simple geste de bonne volonté, mais un devoir fondamental. La loi prévoit d’ailleurs certaines dispositions à cet égard, dont celles-ci :
- le droit, pour tout titulaire, d’obtenir une copie de la résolution déterminant les caractéristiques des parts;
- le droit, pour un membre, de consulter la section du registre concernant le capital social;
- l’obligation, pour la coopérative, d’inclure dans son rapport annuel un état du capital social comprenant les demandes de remboursement des parts et les prévisions de remboursement des parts;
- le droit, pour un titulaire de parts qui n’est plus membre, de consulter le dernier rapport annuel.
La loi n’interdit surtout pas d’en faire plus : osez aller plus loin, pour que l’information aux titulaires de parts soit la plus complète et la plus à jour possible. Vous pourrez ainsi préserver les liens avec des alliés particulièrement précieux!
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