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Les conflits sur le commerce du bois d'œuvre entre le Canada et les États-Unis
Le commerce du bois d’œuvre entre le Canada et les États-Unis pose problème depuis plusieurs décennies. Les États-Unis prétextent que le Canada, autant le gouvernement fédéral que les gouvernements provinciaux, subventionne les producteurs de bois d’œuvre résineux, ce qui contreviendrait aux engagements internationaux contractés par le Canada. Voici un résumé des conflits qui persistent dans le temps et des éléments qui expliquent l’importance de la victoire remportée par le Québec auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
1982-1983 (Lumber I)
Le département du Commerce des États-Unis (United States Department of Commerce, DOC), à qui l’industrie américaine du bois d’œuvre avait demandé d’instaurer des droits compensateurs sur le bois d’œuvre canadien, rend sa décision : les droits de coupe canadiens ne constituent pas une subvention spécifique.
Conséquence : Aucun droit compensateur ne peut être instauré.
1986 (Lumber II)
L’industrie américaine revient à la charge, et le DOC lui donne gain de cause cette fois-ci. Toutefois, les États-Unis et le Canada parviendront à un accord : une taxe à l’exportation de 15 % sera prélevée par Ottawa sur les exportations canadiennes de bois d’œuvre à destination des États-Unis.
Conséquence : Le Protocole d’entente (Memorandum of Understanding, MOU) signé par le Canada et les États-Unis.
1989
L’Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis (ALE) entre en vigueur.
1991-1996 (Lumber III)
En 1991, à la suite de l’augmentation des droits de coupe dans certaines provinces (C.-B. et Qc), le Canada se retire du MOU de 1986. Les États-Unis, en désaccord, imposent eux-mêmes des droits compensateurs sur les produits canadiens. C’est un groupe spécial, sous l’égide de l’ALE, qui tranchera la question : le Canada gagne la cause et, en 1996, le montant des droits compensateurs prélevés par les États-Unis est remis au Canada.
Conséquence : Les deux parties signeront, en 1996, le premier Accord sur le bois d’œuvre résineux. Un système de quotas est implanté. L’accord est d’une durée de cinq ans.
1994
L’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) entre en vigueur.
2001-2006 (Lumber IV)
L’Accord sur le bois d’œuvre résineux de 1996 arrive à échéance. S’en suit une série de plaintes déposées par l’industrie américaine. En plus d’imposer des droits compensateurs aux prétendues subventions canadiennes, les États-Unis ajoutent, pour la première fois, des droits antidumping à leur calcul. Le Canada contestera ces mesures devant l’OMC et devant l’ALÉNA. Les deux institutions lui donneront gain de cause.
Conséquence : En 2006, un nouvel Accord sur le bois d’œuvre résineux (ABR) est signé par le Canada et les États-Unis. L’accord est d’une durée de sept ans avec la possibilité de le prolonger de deux ans.
2006-2015 Accord sur le bois d’œuvre résineux (ABR)
- Entre 2007 et 2011, les États-Unis entament des procédures d’arbitrage contre le Canada à trois reprises. Les États-Unis auront gain de cause dans le premier arbitrage, et une surtaxe de 10 % sur les exportations provenant du Québec, de l’Ontario, du Manitoba et de la Saskatchewan sera imposée de 2009 à 2011. Le Tribunal d’arbitrage donnera partiellement raison aux États-Unis au terme du deuxième arbitrage, mais la troisième plainte américaine sera rejetée.
- En 2012, l’ABR est prolongé jusqu’au 12 octobre 2015.
2016-2020 (Lumber V)
- Le 25 novembre 2016, la U.S. Lumber Coalition dépose une plainte formelle auprès des autorités américaines pour concurrence déloyale de l’industrie canadienne et réclame l’imposition de droits compensateurs et antidumping sur les produits de bois d’œuvre résineux provenant du Canada.
- Au printemps 2017, le gouvernement du Québec modifie le programme ESSOR afin d’offrir aux entreprises québécoises qui étaient en difficulté financière des prêts et des garanties de prêt.
- De juin à octobre 2017, la ministre canadienne des Affaires étrangères et le secrétaire américain au Commerce échangent sur un éventuel accord, mais les deux parties ne parviennent pas à une entente.
- En décembre 2017, le DOC a ordonné l’imposition de droits compensateurs et antidumping sur le bois d’œuvre québécois. Les entreprises, à l'exception des Produits forestiers Résolu, se voient assujetties à des taux combinés de 20,23 %.
- Entre novembre 2017 et janvier 2018, trois recours sont déposés par le gouvernement du Canada en vertu du chapitre 19 de l’ALÉNA pour contester les droits compensateurs et antidumping imposés par le gouvernement américain.
- En novembre 2017, le Canada conteste, en parallèle, les droits compensateurs et antidumping devant les instances de l’OMC. Une délégation du Québec participe activement à ces recours.
- Le premier recours visant les droits antidumping est examiné par l’OMC, et le rapport final du groupe spécial est publié par l’OMC le 9 avril 2019.
- Le second recours vise les droits compensateurs. Le rapport final du groupe spécial est publié par l’OMC le 24 août 2020 et stipule que le DOC n’avait pas agi de façon objective et impartiale relativement à la plupart des allégations du Canada et à toutes celles du Québec lors de son enquête sur le bois d’œuvre résineux en 2017.
- En avril 2019, le DOC a entrepris la première révision administrative de son enquête sur le bois d’œuvre. Les résultats de cette révision sont attendus en novembre 2020.
- Le DOC a entrepris la deuxième révision administrative de son enquête en avril 2020. Les résultats sont attendus en novembre 2021.