Le Québec compte près de 2 900 coopératives non financières régies par la Loi sur les coopératives (RLRQ, chapitre C-67.2), dont l'application relève du ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations. Ces dernières années, quelques problèmes relatifs à l'application et à l'interprétation de cette loi ont été documentés, et le mouvement coopératif a collaboré avec le ministère de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations (MEIE) afin que soient apportées certaines modifications.
Le projet de loi modifiant la Loi sur les coopératives vise à résoudre particulièrement des problèmes liés au secteur des coopératives d'habitation et à la coopération du travail, tout en dotant le MEIE de dispositions législatives lui permettant d'offrir des services électroniques sécurisés aux coopératives non financières.
La quasi-totalité des 1 300 coopératives d'habitation du Québec a bénéficié de programmes gouvernementaux d'aide à l'habitation. La majorité des conventions d'aide financière signées avec ces coopératives arrivera à échéance au cours de la prochaine décennie, rendant le parc immobilier coopératif plus vulnérable à des tentatives de privatisation et au détournement de son affectation.
Afin de préserver le patrimoine de ces coopératives, la vente d'un immeuble ou son changement d'affectation seraient désormais assujettis à une autorisation préalable du ministre chargé de l'application de la Loi. Cette formalité permettrait au MEIE de s'assurer que les transactions s'effectuent dans le respect des exigences prévues à la Loi. Les coûts liés aux formalités administratives associées à cette démarche sont estimés à 900 $. Il est estimé que cinq coopératives d'habitation seraient annuellement assujetties à ces nouvelles dispositions. Par ailleurs, l'impact sociétal serait considérable puisque la mesure permettrait de préserver le parc coopératif de logements sociaux et communautaires.
Le projet de loi propose également une solution à un problème auquel sont confrontées les coopératives qui comptent des membres travailleurs. Puisque la Cour d'appel du Québec a considéré comme illégale, en 2006, la suspension d'un membre travailleur d'une coopérative pour le motif que cette suspension n'avait pas été décidée par le conseil d'administration, il est proposé d'habiliter la direction générale d'une telle coopérative à imposer certaines mesures administratives ou disciplinaires envers les membres travailleurs. Cette clarification de la Loi n'engendrerait aucun coût pour les coopératives et permettrait de simplifier la gestion de leurs ressources humaines.
Dans un souci d'allègement du fardeau réglementaire et administratif imposé aux coopératives, le MEIE souhaite offrir à ces dernières, par le projet de loi, des services électroniques sécurisés équivalents à ceux déjà proposés par le Registraire des entreprises du Québec (REQ). Ces dispositions ne comportent aucun coût additionnel pour les coopératives. Annuellement, 170 demandes relatives à des actes légaux sont présentées, en moyenne, au ministre. Grâce aux services électroniques sécurisés, les coopératives non financières verraient leurs coûts de production et de transmission des documents réduits, pour des économies annuelles estimées à 7 140 $.
Le mouvement coopératif québécois est constitué des coopératives de services financiers regroupées au sein du Mouvement Desjardins, des mutuelles d'assurance et des coopératives non financières.
Le projet de loi modifiant la Loi sur les coopératives concerne uniquement les coopératives non financières (2 900 entreprises). Il ne concerne pas les coopératives de services financiers et les mutuelles d'assurance, qui ont leur propre loi.
La Loi sur les coopératives fait l'objet d'une révision périodique visant à la rendre plus efficace et efficiente. Les derniers changements de fond apportés à cette loi sont entrés en vigueur le 17 novembre 2005. Depuis, certains problèmes d'application et d'interprétation ont été documentés.
Un nombre restreint de modifications est proposé. Les dispositions législatives envisagées s'inspirent des propositions du mouvement coopératif et des partenaires gouvernementaux ainsi que de certaines règles prévues à la Loi sur la publicité légale des entreprises (RLRQ, chapitre P-44.1) et à la Loi sur les sociétés par actions (RLRQ, chapitre S-31.1).
Le projet de loi vise à résoudre particulièrement les problèmes suivants :
Les coopératives d'habitation constituent un important parc de logements sociaux et communautaires créé en grande partie grâce à des investissements publics considérables. La quasi-totalité des immeubles appartenant aux coopératives d'habitation a été construite, acquise, restaurée ou rénovée dans le cadre de programmes gouvernementaux d'aide à l'habitation.
La majorité des conventions d'aide financière signées avec ces coopératives arrivera à échéance au cours de la prochaine décennie. D'ici 2024, près de 700 coopératives d'habitation, soit plus de la moitié du parc de logements coopératifs québécois, verront leur convention arriver à terme. Lorsque ces ententes prendront fin, le parc immobilier coopératif deviendra plus vulnérable à des tentatives de privatisation et au détournement de son affectation en contravention aux exigences de la Loi.
Dans un contexte de croissance du marché immobilier, ces bâtiments éventuellement libres de charges suscitent l'intérêt. De plus, certains membres de coopératives d'habitation responsables de l'administration de celles-ci cherchent parfois à se délester de ce mandat exigeant.
Au cours des cinq dernières années, une quinzaine de tentatives de mainmise sur ces actifs ont été constatées. La vente de ces immeubles en dérogation des exigences de la Loi sur les coopératives a dû être contrée ou contestée devant les tribunaux. Compte tenu du nombre de conventions venant à échéance d'ici dix ans, l'ampleur de ce phénomène risque d'augmenter.
Un renforcement des mesures propres aux coopératives d'habitation est proposé afin de préserver la pérennité du parc de logements coopératifs et l'affectation de ces immeubles, tout en évitant de judiciariser les tentatives abusives d'appropriation.
Les coopératives de travail et certaines coopératives de solidarité exploitent des entreprises qui ont pour objet de fournir du travail à leurs membres.
Le 21 février 2006, la Cour d'appel du Québec, dans l'affaire « Coopérative des techniciens ambulanciers du Québec c. Raymond Bouchard », a considéré comme illégale la suspension d'un membre travailleur d'une coopérative de travail pour le motif que cette suspension avait été décidée uniquement par la direction générale de la coopérative. Selon la Cour d'appel du Québec, lorsqu'une coopérative veut prendre des mesures disciplinaires à l'égard d'un membre travailleur, elle doit agir par l'entremise exclusive de son conseil d'administration.
Une coopérative qui compte des membres travailleurs devrait pouvoir, comme toute autre forme d'entreprise, prendre certaines mesures administratives ou disciplinaires par l'entremise de sa direction générale. Dans le cas de fautes graves, elle devrait pouvoir agir immédiatement sans tenir au préalable une séance du conseil d'administration.
Il est proposé de résoudre les problèmes pratiques engendrés par l'interprétation des articles 57 et 58 de la Loi sur les coopératives afin d'offrir à ces entreprises la souplesse nécessaire pour la gestion courante de leurs ressources humaines.
Le ministre chargé de l'application de la Loi sur les coopératives procède à la constitution, à la continuation, à la fusion et aux autres actes légaux relatifs aux coopératives.
Les dispositions de la Loi sur les coopératives ne permettent pas l'utilisation des nouvelles technologies pour le dépôt des documents requis et les communications avec le ministre par voie électronique sécurisée.
Les services offerts aux coopératives non financières sont donc en décalage avec ceux proposés depuis 2011 par le REQ aux sociétés par actions. Conformément aux objectifs poursuivis par le gouvernement du Québec, le contenu des requêtes et des statuts présentés au ministre, les exigences de signature et les modalités de transmission imposées aux coopératives devraient être simplifiées.Le projet de loi vise essentiellement à :
Depuis près de dix ans, diverses interventions en matière d'information, d'éducation et de prévention ont eu lieu auprès des coopératives d'habitation pour rappeler que leur patrimoine ne peut être partagé entre les membres ou auprès de tiers. La Confédération québécoise des coopératives d'habitation et les fédérations régionales de coopératives d'habitation ont réalisé des activités de sensibilisation, telles que la tenue de colloques et la publication de chroniques juridiques à ce sujet. Le MEIE, quant à lui, a répondu aux demandes provenant du public, en plus d'informer les conseils d'administration de certaines coopératives d'habitation des règles auxquelles elles sont assujetties et de publier sur son site Web une chronique de vulgarisation concernant la propriété des actifs d'une coopérative.
Ces actions pertinentes apparaissent toutefois insuffisantes pour préserver la pérennité de la vocation sociale et communautaire des immeubles des coopératives d'habitation. Une intervention législative est proposée, comme souhaité par le Conseil québécois de la coopération et de la mutualité, la Confédération québécoise des coopératives d'habitation et les fédérations régionales de coopératives d'habitation.
Comme les problèmes associés à la coopération du travail et aux exigences documentaires prévues à la Loi découlent de dispositions législatives existantes, seules des options réglementaires permettraient de les résoudre.
Les coopératives non financières sont présentes dans de nombreux secteurs de l'économie, dont l'habitation, l'agroalimentaire, l'alimentation, l'industrie forestière, les services à domicile, la santé, les loisirs, les arts et la culture, le milieu scolaire et le milieu funéraire.
Elles sont actives dans toutes les régions du Québec. En 2010, l'actif total des coopératives ayant transmis leur rapport annuel au MEIE s'élevait à 6 milliards de dollars, alors que leur chiffre d'affaires atteignait 12 milliards de dollars.
Au 31 décembre 2013, on comptait au Québec près de 1 300 coopératives d'habitation en activité, lesquelles géraient un parc immobilier d'environ 30 000 logements et généraient collectivement plus de 225 millions de dollars de revenus annuels. La valeur des actifs appartenant à ces coopératives dépassait le milliard de dollars.
Secteurs touchés : coopératives non financières
Nombre d'entreprises touchées : 2 895 coopératives actives au 31 décembre 2013, dont :
Petites et moyennes entreprises (PME) : | 2 865 |
Grandes entreprises : | 30 |
Total : | 2 895 |
Caractéristiques complémentaires des coopératives non financières selon les données des coopératives déclarantes en 2010 :
Nombre d'employés : | 44 844 |
Chiffre d'affaires : | 12 milliards de dollars |
Total de l'actif : | 6 milliards de dollars |
Nombre de membres : | 1 309 128 |
Comme mentionné précédemment, les coopératives d'habitation dont un immeuble a été construit, acquis, restauré ou rénové dans le cadre d'un programme gouvernemental d'aide à l'habitation devraient désormais, lors de la vente de l'immeuble ou de son changement d'affectation, obtenir une autorisation préalable du ministre chargé de l'application de la Loi. Cette demande, présentée sous forme de lettre, devrait contenir les renseignements relatifs à la transaction projetée et être accompagnée d'un état certifié des charges grevant l'immeuble. Il est évalué que la rédaction d'une telle demande par les coopératives pourrait être réalisée dans un délai maximal de huit heures. En tenant compte du volume historique de projets de disposition d'immeubles ayant été portés à l'attention du MEIE, soit une quinzaine de cas en cinq ans, un nombre annuel moyen de cinq demandes est estimé.
Coûts liés aux formalités administratives | Coûts non récurrents (coût unitaire) |
Coûts récurrents (coût unitaire) |
Nombre estimé de demandes par année | Total par année |
---|---|---|---|---|
Coopératives d'habitation Coût de production de la demande d'autorisation et de sa transmission au ministre |
180 $ | 0 $ | 5 | 900 $ |
Coopération du travail Aucune formalité administrative |
0 $ | 0 $ | 0 | 0 $ |
Services transactionnels et simplification administrative Aucune formalité administrative |
0 $ | 0 $ | 0 |
0 $ |
Total | 180 $ |
|
|
900 $ |
Les solutions proposées offrent les avantages suivants :
L'introduction d'une obligation, pour une coopérative d'habitation dont un immeuble a été construit, acquis, restauré ou rénové dans le cadre d'un programme gouvernemental d'aide à l'habitation, d'obtenir une autorisation préalable auprès du ministre responsable de l'application de la Loi avant d'en disposer devrait avoir un important effet dissuasif à l'égard de toute transaction projetée en contravention à la Loi.
Cette formalité additionnelle devrait contrer l'augmentation des tentatives de démutualisation de ces entreprises au profit d'intérêts privés et assurer la vocation durable de leurs actifs.
La demande d'autorisation, simple et peu coûteuse, se justifie par l'intérêt public prépondérant de protéger le patrimoine collectif des coopératives d'habitation afin de préserver ces unités de logements sociaux et communautaires pour d'autres générations.
La clarification proposée aux règles applicables aux coopératives comptant des membres travailleurs simplifierait la gestion des ressources humaines de ces entreprises et réduirait ainsi les coûts afférents.
Les modifications permettraient à ces coopératives d'exercer leur pouvoir de gestion dans les délais requis pour préserver l'efficience de leur entreprise.
L'introduction dans la Loi de dispositions relatives aux documents technologiques et la simplification des exigences administratives et des formulaires requis lors du dépôt des statuts et des requêtes auprès du ministre assureraient la mise à niveau des services offerts aux coopératives avec ceux déjà proposés par le REQ.
La disponibilité de services transactionnels sécurisés permettrait l'accélération du traitement des actes légaux relatifs aux coopératives et la réduction des coûts qui y sont associés. Annuellement, la réduction du temps nécessaire à la préparation et à la transmission des formulaires et une option de paiement électronique engendreraient des économies de 7 140 $ pour une moyenne de 170 demandes présentées au ministre par des coopératives non financières.
Économies liées aux services transactionnels et à la simplification administrative | Économies non récurrentes (économie unitaire) |
Économies récurrentes (économie unitaire) |
Nombre estimé de demandes par année | Total par année |
---|---|---|---|---|
Coût de production et de transmission des formulaires | 35 $ | 0 $ | 170 | 5 950 $ |
Paiement électronique (remplacerait le mandat-poste) | 7 $ | 0 $ | 170 | 1 190 $ |
Total | 42 $ | 7 140 $ |
Aucun effet n'est anticipé sur l'emploi.
Le projet de loi propose des solutions utiles à toutes les coopératives non financières; aucune adaptation particulière en fonction de la dimension de l'entreprise n'est requise.
Les nouvelles mesures proposées pour protéger le patrimoine collectif des coopératives d'habitation administrant des logements sociaux et communautaires n'auront pas de répercussions sur leur compétitivité, car ces dernières offrent leurs services exclusivement sur le territoire du Québec.
Les autres solutions proposées allègeront le fardeau administratif de l'ensemble des coopératives non financières du Québec.
À la suite de l'adoption des modifications proposées, les mesures d'accompagnement suivantes sont prévues :
L'analyse d'impact réglementaire du projet de loi modifiant la Loi sur les coopératives démontre que l'introduction de dispositions législatives applicables aux coopératives d'habitation et aux coopératives comptant des membres travailleurs est requise. Seules des modifications réglementaires permettraient de résoudre les problèmes d'application et d'interprétation documentés. Les modifications proposées tiennent compte des réalités des secteurs touchés. Elles permettraient d'assurer une protection accrue du patrimoine coopératif et soutiendraient l'efficience de ces entreprises.
Les solutions avancées ne généreront que peu ou pas de coûts pour les coopératives visées. De plus, l'accès à des services électroniques sécurisés pour toutes les coopératives non financières allègera leur fardeau administratif.
Ministère de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations
Direction du développement des coopératives
Mme Guylaine Morin
Courriel : guylaine.morin@economie.gouv.qc.ca